• « La religion est comme un ver luisant, il lui faut l'obscurité pour briller ». Si l'on en croit Schopenhauer, de la discussion sur la pertinence d'une référence à Dieu dans le préambule de la constitution européenne aux récentes concertations sur la laïcité,  la présence de la question religieuse dans le débat public serait le signe certain d'un contexte troublé. Pourtant, la religion, ce qui « relie » (du latin ligo), n'est plus le ciment social officiel qui faisait de la France la « Fille aînée de l'Eglise » : la séparation de l'Etat et de l'Eglise confine théoriquement la croyance en une force surnaturelle souveraine perpétuée par un ensemble de rites et de dogmes à la stricte sphère privée, et ce depuis un siècle. </em />

    Ce XXème siècle a d'ailleurs vu la montée en puissance d'un individualisme de moins en moins compatible avec une adhésion complète aux dogmes religieux, comme le montre la nette tendance à l'essoufflement de leurs institutions. Pourtant, comme le souligne la dernière Enquête Européenne sur les Valeurs, les croyances en la vie après la mort, le mysticisme et l'autospiritualité connaissent une forte hausse. Si la religion continue de faiblir, le religieux, qui a trait au sacré sans pour autant relever d'un ensemble dogmatique, est en pleine croissance. Le religieux se sépare de la religion, tout en perpétuant la conscience d'une transcendance qui postule l'existence d'une force intelligente de nature métaphysique.  Comment expliquer le renouveau du religieux au sein d'une société sécularisée ? C'est parce qu'il s'agit de la nouvelle mutation d'une notion polymorphe, révélatrice d'une angoisse sociale généralisée.

    La nouvelle mutation d'une notion polymorphe</strong />

    Caractère infrangible du religieux </strong />

    La référence à une transcendance est nécessaire à toute organisation sociale</strong />

    « Il n'y a jamais eu de sociétés sans religion.», Bergson. L'histoire montre que la référence à une dimension supérieure est consubstantielle à l'homme, animal religieux. Les cultes de la Révolution, de l'Etre suprême, de la Science, de l'Idéologie, etc., ont systématiquement comblé le vide laissé par la destruction officielle ou officieuse de la religion. « Dieu est mort, on en trouvera d'autres », Régis Debray.

    Toute corruption de cette transcendance engendre des monstres</strong />

    Les conceptions minimalistes de la transcendance, en réduisant sa portée métaphysique et universelle, portent les germes de l'intolérance et du totalitarisme. Les interprétations fondamentalistes, qui la circonscrivent à un texte, engendrent les Torquemada ou les Khomeiny ; les succédanés scientifiques ou humains de cette transcendance engendrent la Terreur ou le nazisme.

    Les particularités du phénomène </strong />

     

    Différents stades de sécularisation</strong />

    La sécularisation est le long mouvement séparant Eglise et société, d'où une perte d'influence de la religion. D'abord,  le désir de parvenir à un climat de liberté religieuse plus complète : ce sont les premières lois sur la laïcité. Puis la relégation de la religion dans la sphère privée et uniquement dans celle-ci. Ce sont les lois de séparation entre l'Eglise et l'Etat. Enfin, l'abolition désirée de la foi : la mort de Dieu serait une émancipation (Nietzsche).

    Un religieux dissocié des religions</strong />

    La racine étymologique à retenir serait plutôt  « lego », ou « cueillette » : la religion « à la carte » reste majoritaire. Les systèmes de croyance contemporains contournent la question fondamentale de la religion (la mort) en clamant que l'on ne va ni mourir ni vieillir (R. Hubbart et l'Eglise de scientologie, les raëliens, l'astrologie, la sophrologie, numérologie, etc.). Même le christianisme est « largement individualisé, délesté de la culpabilisation pécheresse et de la menace de l'enfer, orienté vers l'épanouissement terrestre. » (Yves Lambert). La survalorisation de la réalisation de soi rend la mort d'autant plus inacceptable.

    Le religieux n'a donc changé que de sphères et de formes. Mais son retour dans le débat public, improbable il y a quelques années, semble être le signe d'un malaise indéniable.

     

    Le révélateur d'une angoisse sociale généralisée.</strong />

     

    La variété des interprétations </strong />

     

    La mort des idéologies...</strong />

    L'échec indéniable du communisme et de ses variantes a montré l'utopie du collectivisme, à tel point que la gauche traditionnelle accepte le concept de marché. Pourtant, les faillites du capitalisme moderne en matière d'égalité, et de développement durable notamment, condamnent politiquement toute référence « libérale ». La désaffection du politique va croissante, le credo républicain paraît vieilli, et les symboles même de la République nécessitent une loi pour se faire respecter.

    ... entraîne une crise spirituelle</strong />

    La raison, la science, l'Etat et ses idéologies ne se suffisent plus à eux même en tant que référence transcendantale. La crise sociale et politique trouve un exutoire dans le repli communautaire (affaire du voile). Derrière le religieux se cacherait un sentiment violent de rejet et d'injustice, qui « dévoile » une discrimination réelle et laisse la voie libre aux intégrismes les plus hostiles à la République. « Homo Festivus » se lasserait de son « parc d'abstraction » (Philippe Muray).

    Mais la vigueur de ce qui n'était qu'un tropisme s'explique surtout par la présence d'un formidable catalyseur.

    Le choc eschatologique du 11 septembre 2001</strong />

    Le traumatisme d'une vision apocalyptique</strong />

     

    L'attentat contre les Twin Towers, en direct puis en boucle, a renvoyé à la majorité des occidentaux l'image de leur mort et celle de leur civilisation. L'évènement le plus médiatisé de l'histoire est ainsi la destruction au nom de Dieu d'un des fleurons de la technique humaine et l'assassinat de près de 3000 personnes, ce qui a profondément bouleversé la « weltanschauung » du citoyen lambda, persuadé jusque alors d'être en sécurité dans un monde dont la préoccupation était essentiellement matérielle. Le traumatisme est tel que la question religieuse revient ipso facto</em /> dans la sphère publique, à travers une grille de lecture essentiellement « huntingtonnienne ». Au temps pour Fukuyama.

    La politique du choc des civilisations</strong />

    Le religieux s'impose désormais dans l'opinion comme une clé de compréhension du monde, et la réduction du plus petit dénominateur commun aux groupes humains à la religion, conformément à la pensée d'Huntington, fait apparaître son « choc des civilisations » comme inéluctable. La « Passion du Christ » de Mel Gibson peut même être interprétée comme une tentative de redonner un « bagage idéologique » à un Occident perdu, qui, avec le fondamentalisme musulman, représenterait « l'alpha et l'omega du nihilisme contemporain. » (Maurice G. Dantec). L'intelligentsia, des « néo-cons » à Régis Debray en passant par M. Sarkozy, participe à un retour massif du religieux dans les sociétés démocratiques. Bien que la majorité s'en défende, le choc des civilisations est un tropisme réel, comme le confirment les évènements aux Pays Bas (affaire Van Gogh), ou la sombre affaire des caricatures.

    Ce « retour » désigne donc surtout une modification de la notion de transcendance dans la sphère publique, qui reprend un terme qui passait pour archaïque dans une société démocratisée: le « religieux », également ravivé dans la sphère privée. Les dysfonctionnements de l'intégration républicaine, l'affaiblissement des succédanés idéologiques de la transcendance, dans un contexte international bouleversé par la vision eschatologique du Onze Septembre, expliquent largement ce phénomène. Ce retour du religieux cache cependant un fantasme de l'inconscient collectif, qui ne semble pas voir d'autre horizon pour l'humanité qu'une prophétie auto réalisatrice,  celle d'un choc des civilisations. Au risque de renverser la pensée de Malraux : le XXIème siècle risque de ne pas être, car il sera religieux.

    C'est pas drôle hein?

     


    25 commentaires
  • - NOTE DE SERVICE -

    De : Cécile MARTIN - Direction des Ressources Humaines
    A : Tous les salariés
    Date : 01 / 12
    > Sujet : Fête de Noël

    Chers Tous,

    Je suis heureuse de vous informer que la Fête de Noël de la Compagnie aura
    lieu le 23 Décembre, à partir de midi, dans les salons privés de notre Grill
    House. Il y aura un bar payant avec tout un choix de boissons !
    Nous aurons aussi un petit groupe musical amateur qui chantera des cantiques,
    alors n'hésitez pas à chanter avec lui. Et ne soyez pas surpris de voir
    arriver notre PDG déguisé en Père Noël !!

    Le sapin sera illuminé à partir de 13H00.

    Les échanges de cadeaux entre les membres du personnel pourront se faire à
    partir de ce moment-là.
    Cependant, pour ne gêner personne financièrement, aucun présent ne devra
    dépasser une valeur de 10 Euros.
    Joyeux Noël à vous tous et à vos familles.

    Cordialement,
    Cécile




    Citation:
    - NOTE DE SERVICE -

    De : Cécile MARTIN - Direction des Ressources Humaines
    A : Tous les salariés
    Date : 02 / 12
    Sujet : Fête de Fin d'Année

    Chers tous

    La note d'hier n'avait bien sûr pas pour but d'exclure nos employés de
    confession juive. Nous savons que Hannoukah est une fête importante qui
    coïncide souvent avec Noël, même si cela n'est pas le cas cette année.
    La même optique s'applique à tous ceux de nos employés qui ne sont ni
    chrétiens ni juifs. Pour calmer les esprits et ne vexer personne, toutes
    nos Fêtes de Noël s'appelleront désormais Fêtes de Fin d'Année.
    Nous n'aurons par conséquent ni sapin ni cantiques, mais d'autres musiques
    pour votre plus grand plaisir.

    Tous contents, maintenant ?

    Cordialement,

    Cécile




    Citation:
    - NOTE DE SERVICE -
    De : Cécile MARTIN - Direction des Ressources Humaines
    A : Tous les salariés
    Date : 03 / 12
    Sujet : Fête de Fin d'Année

    Je m'adresse à la personne membre des Alcooliques Anonymes qui souhaitait
    qu'il y ait une table pour les non-buveurs et qui n'a pas donné son nom. Je
    suis heureuse de pouvoir répondre favorablement à sa demande, mais si je mets
    sur la table une pancarte « Réservé aux Alcooliques Anonymes », vous n'aurez
    plus du tout d'anonymat !!

    Comment puis-je résoudre le problème ? Une idée, quelqu'un ?
    De plus, sachez qu'on laisse tomber les échanges de cadeaux : Aucune remise
    de présents ne sera autorisée, suite aux préavis de grève déposé par la CGT
    et FO qui estiment que 10 Euros pour un cadeau c'est trop cher, et suite à la
    pétition signée par tous les cadres qui estiment que 10 Euros pour un cadeau
    c'est minable et mesquin.

    On va y arriver,

    Cécile.





    Citation:
    - NOTE DE SERVICE -

    De : Cécile MARTIN - Direction des Ressources Humaines
    A : Tous les salariés
    Date : 04 / 12
    Sujet : Fin d'Année

    Quelle diversité de cultures dans notre Compagnie !!
    Je ne savais pas qu'exceptionnellement cette année le Saint Mois du Ramadan
    commençait le 20 Décembre, avec son interdiction formelle de consommer toute
    boisson ou nourriture de toute la journée. Nous pouvons bien sûr comprendre
    qu'une réception festive à cette époque de l'année ne cadre pas avec les
    croyances et les pratiques de nos amis salariés musulmans.
    Devant la Fatwah prononcée à son encontre par l'Imam de notre ville à leur
    demande, notre PDG propose que les repas destinés à nos salariés musulmans
    soient congelés jusqu'à la fin du Ramadan ou gardés au chaud pour qu'ils
    puissent les emporter chez eux le soir. Notre PDG certifie en outre qu'ils ne
    contiendront pas de porc, même si l'entreprise dirigée par son frère
    s'appelle « Tout est bon dans le cochon ».
    Par ailleurs, je me suis arrangée pour que les femmes enceintes aient une
    table au plus proche des WC et les abonnés aux Weight Watchers le plus loin
    du buffet des desserts. Je confirme aussi que les gays et les lesbiennes
    pourront se regrouper et que chaque groupe aura sa table pour ne pas avoir à
    se mélanger. En revanche, non, aucun travestissement en Drag Queen ne sera
    toléré, avec ou sans play back de Dalida. Oui, les diabétiques auront des
    sièges surélevés et des fruits frais en dessert, sachant que les restaurant
    ne pourra confectionner de dessert sans sucre.

    Ai-je encore oublié quelque chose ?

    Cécile




    Citation:
    NOTE DE SERVICE -

    De : Cécile MARTIN - Martyr des Ressources Humaines
    A : A vous tous, salariés de MERDE !!!!!
    Date : 10 / 12
    Sujet : SALOPERIE de Fin d'Année

    Les végétariens, maintenant !! Il ne manquait plus que ça !!!!
    J'en ai plus que marre, nous maintenons cette réception au Grill House, que
    cela vous plaise ou non. Vous n'aurez qu'à vous asseoir le plus loin possible
    du grill à viande pour brouter vos salades à la con et têter vos putains de
    tomates Bio.
    Vous avez pensé à la douleur des salades et des tomates quand on les coupe ?
    hein ??
    Elles ont des sentiments et sont vivantes, elles aussi. Elles sont comme moi,
    elles HUUURLENT !!
    Maintenant le premier qui me demande du pinard sans alcool je le transforme
    en pompe à merde et je vous souhaite une fête archi pourrie, bande d'abrutis
    congénitaux !!!!

    Allez vous faire foutre,

    Cécile




    Citation:
    - NOTE DE SERVICE -

    De : Danièle LECOURBE -
    Directrice intérimaire des Ressources
    Humaines
    A : A tous les employés
    Date : 14 / 12
    Sujet : Cécile MARTIN et les Fêtes de Fin d'Année

    Je pense pouvoir parler au nom de tout le monde pour souhaiter un prompt
    rétablissement à Cécile MARTIN, à qui je continuerai de transmettre vos
    cartes.
    En attendant son retour, je la remplace et vous annonce que notre PDG a
    décidé d'annuler notre Fête de Fin d'Année et d'offrir à tous la journée du
    23 Décembre sans perte de salaire.

    14 commentaires
  • May Chidiac (Avant)

     

     

    Dans la série « Rigolonzunbrin », May Chidiac, une journaliste libanaise anti-syrienne, présentatrice sur la chaîne LBC, a été la cible d'un attentat à la voiture piégée. La sienne en plus.

     

    Une douceur au TNT avait été glissée sous son siège par un petit farceur aux ordres de Bashar Al Assad.

     

    Mais il a raté sa blague, car  May Chidiac avait le mauvais goût de se pencher sur le siège passager, pour poser son sac, au moment où la bombe a explosé.

     

    Elle a survécu, certes, mais pas entièrement : elle y a laissé une jambe et un bras.

     

    La grosse vanne libanaise, c'est que maintenant, elle fait des pieds et des mains pour revenir à la télé.

     

    Repassez-moi la bouteille d'arak svp ...


    18 commentaires
  • L'ancien centre-ville, soigneusement rasé pendant la guerre

    Je suis un affreux colonialiste.

     Car je pense qu'il y a certaines innovations techniques  qu'on n'aurait jamais dû filer au Liban.

    Comme :

     - le klaxon : un Libanais normal préfèrera rouler dans une R5 plutôt que de rouler dans une Porsche sans klaxon. Mais quand il a les deux, c'est le roi. Le roi des chieurs, s'entend. Seul dans le désert, il continuerait d'appuyer dessus comme si sa vie en dépendait. Entre éviter un piéton et klaxonner, le Libanais choisira toujours la deuxième solution.

     - les téléphones mobiles : déjà évoqués plus bas, il est d'abord amusant de voir les étudiants comparer leurs sonneries à la cafète. Maintenant je trouve ça chiant, se taper Céline Dion en format MIDI trois fois par jour vient à bout  des tempéraments les plus placides. Quand c'est Lorie, on se dit qu'on n'a vraiment pas fait 4000 bornes pour rien.

     - les lunettes de soleil : bien que je comprenne que toutes les mesures soient bonnes pour se protéger la rétine de la beauté des Libanaises, je soupçonne que le port de Ray Ban en boîte donne droit à une réduction de 50% sur les consos. Et 75% sur les pouffes.

     - les haut-parleurs : l'appel à la prière cinq fois par jour, c'est pieux, c'est sympa, c'est ambiance locale tout ça. Mais quand y'a la puissance sonore de Bercy en haut de chaque minaret, faut être prêt à tenir les meubles comme dans Mary Poppins. Si les musulmanes portent le voile, c'est pour qu'on ne voie pas les boules Quiès qu'elles ont dans les oreilles (avantage injustement occulté par la Commission Stasi.)

     - la climatisation : dans les salles de cours, il fait moins douze. On a déjà signalé des pingouins sur les bancs de la fac. Cela dit, la maronite doit avoir un système de chauffage interne secret qui empêche la ficelle de son string de geler, c'est un mystère sur lequel il va falloir que je me penche (le chauffage interne, pas le string. Quoique ce dernier est peut être une bonne piste d'investigation.)


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  • La rue Monot est le temple de la jet-set beyrouthine. Cette espèce est assez particulière, dans la mesure où elle se gargarise des plus mauvais côtés du Très Saint Occident Capitaliste, notamment le premier Commandement: afficher sa thune le plus possible.

    Ainsi, il y a une boîte qui facture 1000 dollars la bouteille de champagne. Lors de la commande, la musique s'arrête et le nom du client s'affiche en grosses lettres sur un écran géant, tandis qu'un spot se braque sur lui, pour faire discret bien sûr.

    Les pauvres peuvent néanmoins se résoudre à commander une fausse bouteille de champagne, moyennent la modique somme de 200 dollars, pour avoir droit au même traitement et aguicher du string (la libanaise étant assez vénale.)

    Dans le même registre, il y a les beaux gosses locaux qui se la pètent avec leur portable dernier cri: "Chouf, chouf, c'est un 3G !"

    Alors qu'on peut même pas encore envoyer ne serait-ce qu'un MMS avec le réseau téléphonique libanais.

    Ils feraient presque passer les habitués des Planches pour des gens normaux...


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